#975 – FC Seongnam : 까치 군단

Le corps de pie. Dans sa volonté de prosélytisme, Sun Myung Moon, le fondateur de la secte moon (officiellement Église de l’Unification) envisageait dès 1975 de fonder un club de football. Les liens avec la secte, au travers de son chaebol (conglomérat industriel), Tongil Group, effrayèrent la ligue coréenne ainsi que nombre de municipalités pour accueillir son équipe. Finalement, les Jeux Olympiques de 1988, qui se déroulèrent à Séoul, furent l’impulsion pour passer à l’acte et le 18 Mars 1989, le Ilhwa Chunma FC vit le jour à Gangbuk, district de Séoul. Le club rencontra vite le succès, remportant son premier titre seulement 4 ans après sa création (Coupe de la Ligue en 1992). Derrière, suivirent 7 titres de champion (1993, 1994, 1995, 2001, 2002, 2003, 2006), 3 Coupes de Corée du Sud (1999, 2011, 2014) et deux autres Coupes de la Ligue (2002, 2004). Ilhwa marqua de son empreinte également l’Asie avec 2 ligue des Champions (1995, 2010), une Super Coupe d’Asie (1996) et une Coupe A3 (2004). Après avoir déménagé dans la ville de Seongnam en 2000, la mort de Sun Myung Moon en 2013 faillit emporter le club. Son fils, Moon Kook-jin, n’était pas séduit par la perspective de gérer un club de foot. Il envisagea de le céder et le déménager à Ansan. Mais, impossible pour la ville de Seongnam de se voir déposséder de son club phare au riche palmarès. Son maire, Lee Jae-myeong, décida de le racheter pour le rendre areligieux et en faire un club-citoyen.

L’acquisition se finalisa le 2 octobre 2013. Pour se débarrasser de sa mauvaise image religieuse et pour augmenter le sentiment d’appartenance à la ville, l’ensemble des symboles furent modifiés. La tenue traditionnelle jaune (une des couleurs de la secte) devint noire et la pie fit son apparition sur le nouveau blason. Pourquoi la pie ? Tout simplement car l’oiseau est le symbole de la cité de Seongnam, comme l’azalée pour la fleur et le ginkgo pour l’arbre. La pie représente l’esprit accueillant de la ville envers tous les peuples. Symbole œcuménique en ligne avec la volonté de la ville de rompre avec l’image contrastée ou excluante des anciens propriétaires. Pour le club, la longue queue de la pie devait également représenter son dynamisme et son avenir radieux.

Dans la culture du pays du Matin Calme , la pie n’est pas vue comme voleuse mais comme annonciatrice de bonnes nouvelle, porteuse de chance. Elle se trouve dans de nombreuses chansons folkloriques ainsi que des légendes et contes. Un dicton dit même « 한 해가 시작되는 설날 아침에 까치 소리를 가장 먼저 듣는 사람에게 큰 행운이 찾아든다 » (la grande chance vient à la première personne qui entend le son d’une pie le matin du jour de l’an) tandis que des superstitions indiquent que si une pie touche l’eau, le jour sera clair et si vous construisez une maison sous un arbre avec le nid d’une pie, vous deviendrez riche. On raconte aussi aux jeunes coréens que s’ils jettent en chantant sur le toit une dent qu’ils viennent de perdre, la pie lui ramènera une nouvelle dent. Les peintures anciennes dénommées 작호도 mettaient en avant une pie gazouillant et un tigre (généralement sous la pie et assis). Les deux animaux représentaient des porte-bonheurs, annonçant les bonnes nouvelles pour l’oiseau et chassant les catastrophes pour le félin. Cette image de la pie remonte aux premiers temps des royaumes coréens. Selon le Samguk Sagi, une chronique historique, Talhae, le 4ème roi de Silla, l’un des Trois Royaumes de Corée serait né sous la forme d’œuf. Son père, considérant que c’était un mauvais présage, fit mettre l’enfant dans une boîte et l’abandonna en mer. La boite dériva près de la côte et les bruits de pie qui l’accompagnaient attirèrent des villageois. Ces derniers découvrirent un beau garçon qui devint plus tard le roi de Silla, aimé par son peuple.

Le surnom était donc évident pour le club. Néanmoins, il apparût seulement en 2015 et après un concours mené auprès des supporteurs (toujours dans l’optique de partager la vie et les choix du club avec les citoyens). 236 personnes participèrent et ce fut 까치 군단 qui fut choisi, logique oblige. Park Hong-geun, le vainqueur, repartit avec 3 millions de won (environ 2 500 euros) et deux abonnements au stade.

#141 – Newcastle United FC : the Magpies

Les pies. En observant le plumage noir et blanc de l’oiseau, on comprends très vite la raison de ce surnom puisque le club du nord de l’Angleterre évolue dans des maillots rayés blancs et noirs. Comme souvent, il ne s’agit pas des couleurs originels du club. Newcastle United naquit en 1892 de la fusion de deux clubs de la ville, Newcastle East End FC et Newcastle West End FC. Une fusion ? Plutôt une absorption de West End par East Eand. En effet, les deux clubs étaient rivaux mais West End connut des difficultés financières qui poussèrent les dirigeants à demander un rapprochement avec East End. Cette fusion se concrétisa donc en 1892. Si le club changea de nom pour United, afin de rappeler que les deux clubs étaient maintenant unis, la nouvelle institution garda pourtant les couleurs du vainqueur, East End, ie un maillot rouge et un short blanc (ou peut-être rayé). Les uniformes étaient chers et, si les membres des deux clubs souhaitaient s’unir et effacer leur vieille rivalité, les finances du clubs ne permettaient certainement pas d’achever cette union en changeant de couleur. Toutefois, lors de plusieurs matchs (notamment face à Liverpool ou Arsenal), les deux adversaires se retrouvaient à joueur sous les mêmes couleurs rouges, ce qui évidemment posait des difficultés d’organisation : une des deux équipes devaient trouver un kit de rechange (or, comme dit plus haut, les équipements étaient chers et les clubs n’avait pas plusieurs kits, et encore moins des maillots à domicile et d’autre pour jouer à l’extérieur – on ne parle donc même pas de version third). Il s’avéra qu’un jour de match, Newcastle trouva, comme rechange, un kit de maillots rayés noirs et blancs. On ne sait pas d’où provenait ce kit de rechange. Il semblerait que l’équipe junior jouait avec de tel maillot et l’équipe senior les emprunta. Il se pourrait aussi que Newcastle les avait empruntés à la ligue régionale du comté de Northumberland, auquel Newcastle était attaché. Au final, un passage permanent au noir et blanc suivit rapidement, très probablement pour réduire les conflits de maillots avec les équipes évoluant en rouge, et peut-être aussi afin d’apaiser les anciens supporteurs de West End qui ne se retrouvaient pas dans les couleurs de leur rival de East End. La décision fut donc prise en 1894, comme le révèle le procès-verbal de la réunion du club: « Il a été convenu que les couleurs du club devraient être changées des chemises rouges et des culottes blanches en chemises noires et blanches (rayures de deux pouces) et des culottes foncées ».

Mais pourquoi les maillots de rechange étaient de couleurs noire et blanche ? Là aussi, il existe de nombreuses versions. L’une d’elle se rattache au comté de Northumberland. Ce dernier possède un tartan officiel, également connu sous le nom de Shepherd Plaid ou Border Tartan. Il s’agit d’un tissage croisé à partir de laine de mouton noire et blanche non teinte, affichant au final des petits carreaux noirs et blancs. Une autre théorie remonte à la guerre civile anglaise et au marquis de Newcastle, William Cavendish, et à son régiment Whitecoats. Le régiment portait des manteaux de laine non teints (qu’ils juraient de teindre en rouge avec le sang de l’ennemi) et combattait sous la crête héraldique Cavendish, qui était principalement en noir et blanc. Enfin, une autre version implique une paire de pies qui nichait au stade de St James’ Park et fut « adoptée » par les joueurs de Newcastle. Cette version, qui n’est pas plus admise que les autres, pourrait boucler la boucle avec le surnom.