Les diables rouges. Ce surnom est apparu après la Seconde Guerre Mondiale et a un lien avec le style de jeu de l’équipe à cette époque et à la couleur du maillot. Fleuron du Lander de la Rhénanie-Palatinat, le club actuel résulte de la fusion de plusieurs associations de la ville de Kaiserslautern au début du XXème siècle. Pour choisir les couleurs de la nouvelle formation, celles de la ville, rouge et blanc, s’imposèrent comme symbole unificateur (tous les membres pouvaient s’identifier à ces nouvelles couleurs) et pacificateur (elles n’étaient pas particulièrement liés à l’un des clubs précédents) et demeurèrent les principales. A la sortie de la Seconde Guerre Mondiale, les pénuries et difficultés financières dans l’Allemagne battu étaient nombreuses. Le club se rabattit alors sur le tissu le plus commun, le plus facile à trouver pour faire fabriquer des maillots (avec le soutien de quelques donateurs) et les joueurs évoluèrent ainsi avec un kit intégralement blanc en 1946 et 1947. Mais, cette tenue n’enchanta pas la star de l’équipe, Fritz Walter, et, dès que la situation s’améliora pour le club, il convainquit la direction pour opter pour un kit intégralement rouge. Fritz Walter s’inspira du kit rouge complet de l’équipe de football de l’armée allemande qui se dénommait rote jäger (les chasseurs rouges) et pour laquelle il joua pendant la guerre. Cette tenue fut inaugurée lors d’une finale régionale le 1er mai 1948 face au SV Saarbrücken et le résultat fut sans appel pour Kaiserslautern (7 à 0), impressionnant les reporters locaux. Une nouvelle victoire deux semaines plus tard, le 15 mai 1948, face au Bayern Munich sur le score de 5 buts à 1, enthousiasma public et dirigeants et entérina la décision du changement de couleur. En outre, le 8 août 1948, le club joua et perdit la finale du championnat d’Allemagne en blanc car son adversaire, Nuremberg, évoluait également en rouge et, en tant que sextuple champion d’Allemagne avant guerre, put conserver ses couleurs. Avec cette mésaventure, le rouge s’imposa définitivement. Une période faste débuta alors pour le club sous cette couleur (Champion d’Allemagne en 1951 et 1953, vice-champion en 1948, 1954 et 1955, champion de la zone française en 1947, 1948, 1949 et 1950).
Au-delà de la tenue, le style de jeu développé par la star Fritz Walter et ses équipiers fut la base de cette période dorée. Les mouvements rapides et virevoltants des joueurs semaient l’horreur dans les rangs défensifs adversaires, comme la vision du diable l’aurait fait. En juillet 1948, le club rencontra en phase finale du championnat d’Allemagne, le TSV Munich 1860, qu’il battit 5 buts à 1. Flamboyant, Kaiserslautern éblouit une nouvelle fois spectateurs et journalistes. Edmund Kronenberger, journaliste au Rheinpfalz, compara les joueurs au diable et titra son article « Walters Rote Teufel überfahren München 5:1 » (Les diables rouges de Walter écrase le Bayern 5:1). Ses collègues bavarois du Münchner Abendzeitung et du Süddeutsche ne furent pas en reste et titrèrent respectivement « Pfälzer Rote Teufel in großer Fahrt » (Les Diables Rouges du Palatinat en grande pompe) et « Gegen Rote Teufel auch Löwen machtlos » (Contre les diables rouges, les lions aussi sont impuissants -cf article #406). Le surnom ne s’imposa pas de suite, notamment car l’équipe était plutôt connue sous le nom de « Waltermannschaft » (l’équipe de Walter) ou « Walterelf » (le onze de Walter), en raison de la présence du maître à jouer, Fritz Walter, et de son frère Ottmar. Avec le premier titre de championnat remporté le 30 juin 1951, contre Preußen Münster (que cette fois Kaiserlautern disputait dans leur tenue rouge), le surnom fut reprit allégrement par la presse berlinoise et devint ainsi populaire dans tout le pays et même au-delà.
Il semblerait aussi que la comparaison avec le diable soit née avant guerre. Le terme teuflisch (diabolique) ou wie die Teufel (comme le diable) aurait été utilisé pour décrire le style de jeu de l’équipe déjà avant guerre. Dès 1934, le magazine Der Kicker qualifia les joueurs de diables car, suite à une série de victoires du club, le journaliste indiqua que les joueurs couraient wie wildgewordene Teufel umher (comme des diables déchaînés). Si la façon de jouer inspira cette comparaison, quelques habitants et supporteurs de la ville font un lien entre le diable et le Betzenberg, cette colline où se situe le stade de Kaiserslautern. Le nom Betzenberg pourrait dériver de Belzebuth et Betzen est un terme qui désigne les sorcières dans cette région d’Allemagne. Toutefois, ces dernières hypothèses reposent sur de vieilles histoires, des rumeurs, non documentées.
En 1951 (ou lors du deuxième titre en 1953), un diable défila au côté de l’équipe lors de son retour triomphal à Kaiserslautern. Avec les départs en retraite à la fin des années 50 des frères Walter, Waltermannschaft et Walterelf disparurent des gazettes et le surnom de Roten Teufel prit définitivement le relais et le club se l’appropria. En 1977, la mascotte dénommée Betzi et représentant un diable fut créée. A compter de 1991, elle circule le long du terrain lors des matchs à domicile. Malheureusement, ce club historique connait depuis 10 ans une longue descente aux enfers puisqu’il descendit en 3ème division en 2018 et se plaça en faillite en 2020.