#992 – FK Voždovac : Zmajevi

Les dragons. Un beau dragon rouge déployé orne l’écusson du club de la banlieue peuplée de Belgrade (près de 155 000 habitants). Ecrasé par la rivalité Etoile Rouge – Partizan, Voždovac ne fait même pas office de petit poucet dans le football de la capitale, rôle tenu par l’OFK Belgrade. Pourtant, l’équipe évolue dans l’élite serbe, le club est un historique (fondé en 1912) et possède la particularité d’avoir un stade de 5 000 places bâti sur le toit d’un centre commercial.

Ce dragon vise à rappeler les soulèvements serbes du XIXème siècle qui permirent aux pays de s’affranchir du joug ottoman. Pendant près de 400 ans, la Serbie et les territoires voisins étaient des vassals de la sublime porte. Mais, après la défaite contre l’Empire Autrichien au XVIIIème siècle, l’Empire Ottoman ressortit affaibli, offrant l’opportunité aux populations Slaves de tester leurs idées nationalistes. Ainsi, une première révolte des Serbes se déroula entre 1804 et 1813. Ce soulèvement débuta dans la région de Šumadija, au Sud de Belgrade et de Voždovac. Les rebelles Serbes étaient dirigés par Georges Petrović, surnommé Karageorges. L’un de ses lieutenants était Vasa Čarapić, né à Beli Potok, un village au pied de la montagne Avala, à quelques kilomètres de Voždovac. En 1806, alors que Karageorges hésitait à chasser les représentants des Ottomans de Belgrade, Čarapić fut le seul à croire à la libération de la ville et réussit à convaincre Karageorges. Avec ses 3 000 soldats, Čarapić attaqua Belgrade par le Sud mais fut mortellement blessé. Dans la construction du récit national, il devint le héros qui donna sa vie pour la libération de la capitale. Les différentes troupes de rebelles Serbes étaient souvent nommées dragon et leurs chefs héritèrent de ce surnom. Ainsi, Stojan Čupić était Zmaj od Noćaja (Dragon de Noćaj). Vasa Čarapić fut surnommé Zmaj od Avala (Dragon d’Avala).

#953 – FK Napredak Kruševac : Čarapani

Les chaussettes. Fondé le 8 décembre 1946, le club résulta de la fusion de Zakić, Badža et 14. Oktobar. Son nom, Napredak, signifie progrès en serbe. Voir du progrès dans les chaussettes paraît un peu étonnant. D’ailleurs, la ville de Kruševac n’est pas le berceau de la chaussette, la première apparition de cette dernière remontant à l’an 2000 av. J.-C. en Syrie. Cette histoire de chaussette est attachée à la ville et ce surnom est devenu le gentilé de ses habitants.

Après la bataille du Kosovo (1389), Kruševac devint la capitale de la Serbie gouvernée par la princesse Milica, puis par le despote Stefan, qui transféra en 1403 la capitale à Belgrade. La ville tomba aux mains de l’Empire Ottoman en 1427 après la mort du despote Stefan. Cette domination turque perdura jusqu’en 1833, après plusieurs soulèvements serbes à compter de 1804. Ce fut lors de cette première révolte pour l’indépendance que les habitants de Kruševac auraient gagné ce surnom. La défaite de la Sublime Porte dans la guerre austro-ottomane de 1788-1791 fit renaître la conscience nationaliste serbe et le Sultan Selim III dut concéder de nombreux droits aux élites locales. Mais, les nouvelles difficultés du Sultan face à Napoléon en Egypte conduisirent les troupes turcs (les janissaires) à réprimer les populations de l’Empire pour maîtriser les velléités indépendantistes. Face aux brimades des janissaires, les serbes menèrent un premier soulèvement qui se transforma en une guerre d’indépendance, s’étalant entre le 14 février 1804 et le 7 octobre 1813. En 1806, les insurgés de Kruševac devaient affronter les Turcs. Selon la légende, la nuit précédant la bataille, ces derniers tentèrent de surprendre les troupes ottomanes. Pour cela, il se faufilèrent près du camp militaire ottoman après avoir enlevé leurs chaussures pour ne pas faire de bruit. Leur courage et leur ruse leur permirent de tuer les soldats Turcs et de remporter la bataille. Comme les Serbes s’étaient présentés en chaussette au combat, ils furent surnommés ainsi. Il s’agit de la version la plus communément admise. Mais, certains racontent cette légende en la resituant à l’époque du Prince Lazar qui combattit l’Empire Ottoman en 1389. Voire ceux qui portaient les chaussettes n’étaient peut-être pas les Serbes mais plutôt les Turcs. En effet, surpris dans leur sommeil, les Ottomans auraient détalés à peine habillé en chaussette. Résultat, on ne peut pas affirmer avec certitude quand et comment les habitants de Kruševac sont devenus Čarapani.

Une autre version narre que le prince Lazar attribua un signe distinctif à ses chevaliers les plus braves et en qui il avait le plus confiance. Ainsi, en intégrant la garde personnelle du prince, ces chevaliers devaient porter des chaussettes rouges qui remontaient jusqu’aux genoux. Le port de ce vêtement était alors un honneur. Au Moyen Âge, la teinture rouge était rare et chère et donc les vêtements de cette couleur était peu répandue, sauf parmi les populations les plus aisées (nobles et riches marchands). Ils étaient même parfois strictement réservés aux membres de la famille du souverain. Ainsi, ces chaussettes ne passaient pas inaperçues parmi la population ou sur les champs de bataille. D’ailleurs, lors de la célèbre bataille du Kosovo en 1389, ces soldats se distinguèrent par leur bravoure. En se renseignant à leur sujet, les gens découvrirent que ces braves provenaient de la région de Kruševac. Or, leur signe si distinctif était suffisant pour leur valoir le surnom de Čarapani.

Enfin, ils existent encore d’autres histoires. Il se pourrait que depuis de nombreux siècles, la coutume veut que les hommes de Kruševac portent de longues chaussettes brodées. Révélant une certaine esthétique et soulignant le caractère unique de leur vêtement traditionnel, ces chaussettes sont devenues le principal symbole de l’ancienne capitale serbe.

#892 – ER Belgrade : Црвено-бели 

Les rouge et blanc. En s’appelant l’Etoile Rouge, le club ne semblait pas avoir d’autre choix que d’évoluer en rouge et blanc. Mais les évidences … En 1945, à l’issue de la Seconde Guerre Mondiale, les clubs sportifs serbes d’avant-guerre avaient tous disparu et les autorités communistes profitèrent de cet état pour réorganiser le tissu sportif, avec l’objectif de diffuser son idéologie et consolider le nouveau régime. Dans ce contexte, à l’initiative du Conseil principal de l’Union unie de la jeunesse antifasciste de Serbie (USAOS), les deux grands clubs serbes émergèrent à quelques jours d’écart : l’Etoile Rouge le 4 mars, puis Partizan le 4 octobre 1945. L’article #87 raconte le choix du nom et du fameux symbole du club, l’Etoile. Pour les fondateurs, il restait également à choisir les couleurs du club. Au départ, 3 couleurs furent retenues : bleu, blanc et rouge. Ce trio avait l’avantage d’être les couleurs de la ville de Belgrade mais également celles du drapeau de la République de Serbie. Mais, pour le nouveau régime qui voulait mettre sous cloche les revendications nationalistes, cette référence au peuple qui apparaissait dominant n’était pas opportun. Les fondateurs se reportèrent alors sur les couleurs rouge et blanche du SK Jugoslavija. Club historique de Belgrade, ce dernier servit de base pour les structures de l’Etoile Rouge, sans que le nouveau club ne fusse officiellement son successeur. Pourquoi ce précédent club portait du rouge et du blanc ? Après sa création en 1913, les membres du SK Velika Srbija (le premier nom du SK Jugoslavija) cherchèrent à s’équiper mais les kits et accessoires de football ne se trouvaient pas à Belgrade à cette époque. L’un des joueurs, Furjanović, fut envoyé à Vienne (Autriche) pour obtenir l’équipement. Il revint avec des ballons, des chaussures de football et deux ensembles de maillots, l’un vert et l’autre rouge. Au début, les joueurs de l’équipe première évoluaient en vert tandis que les joueurs de réserve portaient le maillot rouge. Mais, le club adopta officiellement sa couleur rouge traditionnelle après la Première Guerre Mondiale avec le changement de nom du club en SK Yougoslavie. Le design du maillot changeait souvent, de sorte que le club jouait avec une chemise unie rouge, et parfois dans des maillots rayées ou à carreaux. En tout cas, le rouge demeura la couleur principale du maillot et du club, donnant alors le surnom crveni (rouge).

Entre 1945 et 1950, les joueurs de l’Etoile Rouge évoluait avec un maillot rouge et un short blanc. Puis, le club adopta le maillot à rayures verticales rouges et blanches. Par la suite, le maillot uni rouge revint. A noter que le bleu ne disparut pas totalement et quelques piqures de rappel eurent lieu. Parfois, les joueurs portèrent un short bleu. De 1995 à 2011, le bleu s’installa au côté du rouge et du blanc sur l’écusson du club.

#644 – FK Smederevo : Oklopnici

Les hommes en armure. L’écusson du club affiche des créneaux d’un chateau fort que l’on retrouve sur les armoiries de la ville de Smederevo. Il s’agit de la forteresse de Smederevo, bâtie au XVème siècle et qui constitua l’un des principaux bâtiments de défense du Despotat de Serbie. Coincée entre le Royaume de Hongrie et l’Empire Ottoman, la Serbie moyenâgeuse tentait d’exister en jouant sur les deux alliances. Après avoir dû restitué Belgrade à la Hongrie, Đurađ Branković, despote de 1427 à 1456, choisit d’établir sa capital à Smederevo, qui était alors un espace inoccupée, et d’y édifier une forteresse. Située au confluent de la rivière Jezava et du Danube, cette forteresse offrait une position idéale entre les Balkans ottomans et l’Europe centrale hongroise, et par le Danube, donnait un accès direct à Belgrade (à 45 km au nord-ouest). La ville devint alors un important centre commercial et religieux (les reliques de Saint Luc y furent transportées). Protégée par 1,5 kilomètres de murs crénelés d’une épaisseur de 2 mètres et 25 tours de 25 mètres de haut, elle résista aux différents assauts des ottomans en 1439, en 1453, en 1456 et en 1459. Toutefois, lors de la dernière attaque, la ville se rendit sans combattre, mettant fin au despotat de Serbie. Les Ottomans ajoutèrent alors quatre tours d’artillerie en 1480 et la forteresse conserva sa fonction militaire jusqu’à la moitié du XIXème siècle. Malheureusement, son occupation par l’armée allemande lors de la Seconde Guerre Mondiale conduisit à de forte dégradation. La ville de Smederevo se développa autour de la forteresse, qui représente un témoignage unique de la Serbie médiévale et devint le symbole de la ville. Le surnom du club fait donc référence à cet ouvrage ainsi qu’au courage des Serbes qui défendirent la ville face aux Ottomans.

#571 – FK Vojvodina Novi Sad : Crveno-beli

Les rouges et blancs. Fondé le 6 mars 1914, le club porta pour son premier match un maillot bleu et un short blanc. Malheureusement, la Première Guerre Mondiale éclata et ce fut le seul match du nouveau club avant la fin des hostilités. En 1918, des hommes d’affaires et des intellectuels éminents commencèrent à se rassembler autour du club et les statuts du FC Vojvodina furent approuvés par le ministère compétent. Le club fut exclusivement financé par les cotisations des membres, grâce à des généreuses contributions ainsi que le soutien du mouvement pro-slave Sokol dont le premier président du club, Dr Zivko Bajazet, était le représentant. Ce mouvement pro-slave fut fondé à Prague, ville de l’Empire Austro-Hongrois avant guerre comme la Serbie. Plusieurs des membres fondateurs du club avaient vécu et étudié à Prague et avaient même pratiqué le football au sein de Slavia Prague. En 1920, ces derniers rapportèrent un ensemble de maillots rouges et blancs du Slavia qu’ils firent don au FC Vojvodina (à moins que ce soit le Slavia qui décida d’aider le FK Vojvodina et qui donna donc ses maillots). Lors de l’assemblée du club tenue le 23 juillet 1922, la direction décida que les couleurs rouge et blanche orneraient désormais les maillots du club. De même, ils optèrent pour un écusson du club à l’image des armoiries de Slavia de Prague, ie une partie rouge et une partie blanche, avec une étoile. Toutefois, la couleur de l’étoile devint bleu alors que celle du Slavia était rouge. Ainsi, l’écusson du club reprenait les 3 couleurs du drapeau serbe : blanc, bleu et rouge.

#379 – FK Čukarički : Brđani

Les hommes de la colline. Le club fut fondé le 4 juillet 1926, dans le quartier ouvrier du vieux Čukarica, à Belgrade. Jusqu’au milieu des années 90, le club concourrait surtout dans les ligues régionales. Puis, il commença à apparaître en première division yougoslave puis serbe (et même en Coupe d’Europe). Malheureusement, le 18 novembre 2011, le club fut déclaré et mis aux enchère. Le 17 avril 2012, le conglomérat ADOC (actif dans le BTP, la pharmacie …) racheta le club et ce dernier devint le premier club serbe privatisé. Grâce à la privatisation, la situation financière et organisationnelle du club se stabilisa et s’améliora même considérablement. L’entreprise investit également pour améliorer les infrastructures (doublement de la capacité du stade à 8.500 places, construction d’un centre d’entrainement). Résultat, l’équipe remporta en 2015 son premier titre majeur, la Coupe de Serbie. Aujourd’hui, le FK Čukarički est un club sain financièrement et sportivement, qui commence à se faire une place parmi les grands du football serbe. Il n’en demeure pas moins qu’il s’agit avant tout d’un club construit dans un quartier de Belgrade, situé sur les pentes d’une colline d’une hauteur d’environ 220m et dominant la Save et l’île d’Ada Ciganlija.

#355 – FK Rad : Građevinari

Les bâtisseurs. En 1958, un modeste club de Belgrade du nom FK Razvitak évoluait dans les ligues mineures locales. Au premier semestre de cette année, la société de construction GRO Rad se décida à reprendre cette petite structure pour en faire l’équipe de football officiel du club. Le FK Rad reçut un terrain de la municipalité de Banjica, un quartier de Belgrade. L’avantage d’appartenir à une société du bâtiment fut que le club eut les moyens d’y édifier un stade. Plusieurs rangées de stands furent installées ainsi que des vestiaires et un restaurant. Années après années, minutieusement et patiemment, le club se construisit pour devenir un club reconnu de la capitale serbe. En effet, il fédéra à compter des années 80 les belgradois qui ne souhaitaient pas supporter un des deux clubs du régime, l’Etoile Rouge ou le Partizan.

#222 – FK Radnički Niš : Real sa Nišave

Le Real de la Nišava. Ce surnom place le club serbe au même niveau que le Real Madrid et s’est vu attribué au club par ses supporteurs (on n’est jamais mieux servi que par soit-même). Le 14 avril 1963, lors du match FC Radnicki – OFK Belgrade, les supporteurs du club déployèrent dans le stade une banderole où était inscrit « le Real de la Nišava ». Cette banderole fut régulièrement arboré dans le stade du club pendant les années 60. Pourtant le club de Niš, avant 1963, était un modeste club de région et errait dans les divisions inférieures de Yougoslavie. En 1963, le club atteignit pour la première fois la première division et les supporteurs voulurent indiquer par cette banderole (et avec cette comparaison très flatteuse pour le club serbe) que les fans considéraient leur club au sommet, qu’ils en étaient fiers, à quel point il lui portait de l’estime. Malgré ce surnom, le club serbe n’a jamais été en mesure de lutter avec les grands clubs serbes (Etoile Rouge et Partizan) mais il réussit tout de même l’exploit de parvenir en demi-finale de Coupe de l’UEFA en 1982. En 2019, le club termina pour la première fois vice-champion de Serbie. La Nišava est la rivière qui traverse la ville de Niš et qui lui a donné son nom.

#102 – OFK Belgrade : Romantičari

Les romantiques. A la fin des années 50, le club connaît des problèmes financiers. Après une fusion avec un autre club et le soutien des autorités qui « offre » une nouvelle enceinte de 28 000 places, le club changea de nom pour OFK Belgrade et disposait désormais de bases solides. Cette renaissance financière fut accompagnée par l’émergence d’une génération dorée emmenée par le tandem Sava Antić et Josip Skoblar. Les résultats du club s’en ressortirent et, en 1962, l’OFK Belgrade remporta la Coupe du Maréchal Tito (la Coupe de Yougoslavie), après avoir battu le Spartak Subotica. Ce trophée fut le premier avec le nouveau nom d’OFK. Lors de cette épopée, l’équipe gagna non seulement le trophée mais aussi ce surnom, au vue de son jeu flamboyant. Les joueurs de l’OFK semblaient alors personnifier une nation romantique et enthousiaste.

#87 – ER Belgrade : Звезда

L’étoile, le surnom du club étant son symbole. En 1945, à l’issue de la Seconde Guerre Mondiale, les clubs sportifs serbes d’avant-guerre avaient tous disparu et les autorités communistes profitèrent de cet état pour réorganiser le tissu sportif, avec l’objectif de diffuser son idéologie et consolider le nouveau régime. Dans ce contexte, à l’initiative du Conseil principal de l’Union unie de la jeunesse antifasciste de Serbie (USAOS), les deux grands clubs serbes émergèrent à quelques jours d’écart : l’Etoile Rouge le 4 mars, puis Partizan le 4 octobre 1945. L’Etoile Rouge s’empara des structures du SK Jugoslavija, l’un des clubs les plus importants de Belgrade d’avant guerre. Lorsqu’il fallut trouvé un nom, les dirigeants proposèrent ceux en vogue à cette époque : Mladost (Jeunesse), Udarnik (Ouvrier performant), Staline, Lenine, Torpedo, Dinamo, Lokomotiva. Slobodan Ćosić, vice-président, déclara « on pourrait l’appeler l’Etoile ? », ce à quoi Zoran Žujović, l’autre vice-président, répliqua « Étoile, d’accord mais, elle sera rouge alors comme le SK Jugoslavija ». La proposition « Etoile Rouge » fut adoptée et le parti socialiste de Yougoslavie fut ravi de cette idée. Elle avait l’avantage de faire un lien entre le passé (un club historique de l’entre-deux guerres) et le futur (un étendard du communisme).