#1144 – Motor Lublin : Motorowcy

Les hommes des moteurs. Je vous accorde que le nom du club est assez explicite pour comprendre le surnom de l’équipe. Tout a commencé en 1950 quand plusieurs ouvriers employés à la construction de l’usine de construction automobile de Lublin, Fabryka Samochodów Ciężarowych (FSC), fondèrent le club en remplacement d’un ancien club dénommé Metalowca Lublin. Au départ, le club prit le nom Stal Lublin (Stal signifiant Acier, en référence au prédécesseur Metalowca, qui était lié à l’usine métallurgique de la ville). En 1952, la société FSC intégra le club dans son giron et le nom du club devint Stal FSC. Enfin, le Stal FSC changea de nom pour Robotniczy Klub Sportowy Motor Lublin en 1957.

Avant la Seconde Guerre mondiale, des investissements furent réalisés dans le quartier Tatary de Lublin pour établir une usine de la société Lilpop, Rau i Loewenstein afin produire des composants pour voitures et camions sous licence de l’américain Chevrolet. Mais, la guerre mit un terme à ce projet. En 1945, la reprise de l’activité fut envisagée par les nouvelles autorités communistes et en 1950, la construction de l’usine fut entreprise, avec l’aide du grand frère soviétique. Le constructeur soviétique GAZ forma d’ailleurs les premiers employés de l’usine. Le 7 novembre 1951, le premier GAZ 51 (dénommé pour la Pologne, Lublin 51) sortit des chaînes de montage. L’installation de l’usine eut un impact fort dans la ville de Lublin, qui était en reconstruction. Le développement des quartiers résidentiels voisins de Tatary et Bronowice étaient directement liés à la croissance de l’usine. De nouvelles voies routières furent également établies pour faciliter la circulation vers le site industriel. En quelques années, ce dernier devint le plus grand établissement de la région de Lublin et, dans les années 1970, le FSC représentait l’un des plus grands centres automobiles de Pologne. L’usine produisait des camions, voitures et véhicules blindés de transport de troupes. A la fin des années 1970, la société employait environ 11 à 12 000 personnes et le pic fut atteint en 1981 avec 14 000 collaborateurs. Le produit star de FSC à Lublin fut la camionette Zuk. En 1972, 110 000 Żuks avaient été produits, dont 40 000 étaient exportés vers 16 pays. L’apogée de la production fut atteint en 1977, avec 250 000 camionettes, dont 85 000 étaient exportées. En 1976, le département des véhicules utilitaires représentait 50 % de la production de l’usine. Avec la fin du communisme, la production déclina et en 1995, le coréen Daewoo racheta l’usine. Il fit faillite en 2001 et le repreneur revendit par morceau l’usine. Aujourd’hui, après plusieurs changements de propriétaire, l’usine ne fabrique plus que les tracteurs Ursus et les utilitaires Honker.

Le bouquetin qui apparaissait sur le logo de FSC se retrouve sur le blason du club.

#1106 – Podbeskidzie Bielsko-Biała : Górale

Les montagnards. Podbeskidzie, sous sa forme actuelle, fut créé en 1997 suite à la fusion de la section football du BBTS Włókniarz Bielsko-Biała et du DKS Inter Komorowice. Mais, eux-mêmes étaient issus de fusions de différentes associations de la ville, réalisé tout au long du siècle dernier et finalement, les racines du club actuelles se situent au début du XXème siècle, avec le club de la communauté allemande (Bielitzer Fussball Klub fondé en 1907) et un club de quartier (Biała Lipnik fondé en 1910).

Avec tous ces remodelages, difficile de se construire une identité. Mais, un élément demeurait immuable et partagé par l’ensemble de ces associations : la ville de Bielsko-Biała. Bien que cette dernière est également née d’une fusion en 1951 des cités de Bielsko et de Biała. Bielsko-Biała demeure un centre administratif, économique, universitaire et culturel de la région Sud de la Pologne, frontalière avec la Tchéquie et la Slovaquie, souvent appelée Podbeskidzie. Ce nom, Podbeskidzie, signifie « au-dessous des Beskides ». Car, si la ville se baigne dans la rivière Biała et ses affluents, elle se niche sur les contreforts de plusieurs sommets, se situant dans la partie occidentale de la chaîne de moyenne montagne des Beskides. Cette dernière fait partie de la chaîne des Carpates. On dénombre pas moins de 14 sommets à proximité de la cité, dont son altitude s’élève entre 262 m et 1 117 m. Il existe par exemple une télécabine ouverte toute l’année qui relie un des quartiers Sud de la ville au mont Szyndzielnia (1 029 m). Les principaux sommets sont le Skrzyczne (1 257 m), le Klimczok (1 117 m d’altitude), le Trzy Kopce (1 082 m), le Stołów (1 035 m) ainsi que le Czupel (931 m). Bien entendu, de nombreux sentiers pédestres et de trail partent de la ville et une petite station de ski offre quelques capacités de glisse en hiver.

#1077 – Radomiak Radom : Zieloni

Les verts. Pendant la Seconde Guerre mondiale, les clubs sportifs polonais étaient rarement autorisés à poursuivre leurs activités s’ils ne soumettaient pas à l’occupant et donc la jeunesse polonaise était régulièrement privée de la possibilité de pratiquer des sports de manière officielle. Cependant à Radom, comme dans d’autres villes de Pologne, des équipes clandestines se montaient et ce fut le cas parmi les ouvriers de l’usine locale de chaussures (de la marque BATA) et les étudiants de l’école de tannage. Depuis 1939, BATA possédait une usine à Radom, en plus de celle située à Chełmek près de Chrzanów.

Au lendemain de la guerre, l’usine BATA fut nationalisée par les autorités communistes. Włodzimierz Skibiński, son directeur, participa à la création d’une équipe de football au sein de l’usine en réunissant les joueurs des deux équipes clandestines précitées. La réunion fondatrice eut lieu le 7 avril 1945. Ayant reçu l’aide de l’usine de chaussures, le nouveau club a adopté le nom de l’entreprise mécène : KS Bata. Le 13 juillet 1945, une réunion des membres du club eut lieu, au cours de laquelle les statuts furent approuvés et un conseil d’administration de 9 personnes fut élu, Włodzimierz Skibiński devenant le premier président du club. Sur la même idée que le nom, il proposa que les couleurs du club reprennent celles de l’usine : vert et blanc. Le rouge sur l’écusson apparut quand le club fusionna en 1967 avec le vieux club Radomskiego Koła Sportowego, fondé en 1910 et dont le maillot était rayé rouge et blanc.

#1021 – KS Cracovie : Pasy

Les rayures, les ceintures. Ce surnom se réfère au maillot rayé de l’équipe. Champion de Pologne à 5 reprises (ce qui lui confère le droit d’arborer une étoile sur son maillot) et supporté à son époque par le pape Jean-Paul II, le KS Cracovie est le plus ancien club sportif actif de Pologne, sa fondation datant de 1906. Au début du XXème siècle, plusieurs équipes de camarades commencèrent à émerger dans la seconde ville de Pologne. Le 4 juin 1906, un premier match opposa une équipe dénommée studenci (étudiants) ou przodownikami (précurseurs) à Czarni Lviv. Le même jour, une autre équipe montée à la hate, akademicy (académique), affronta le KGS IV Gimnazjum Lviv. Quelques jours plus tard, akademicy devint AKF Cracovia. A l’initiative de Tadeusz Konczyński, un promoteur du football à Cracovie, un tournoi fut organisé dans la ville en Octobre 1906. A cette occasion, Tadeusz Konczyński offrit un jeu de maillot aux deux clubs les plus anciens de la ville, AKF Cracovia et Studenci. Le premier décida d’opter pour un maillot bleu assorti d’une ceinture blanche, couleurs de la ville de Cracovie. Le second opta pour un maillot rayé aux couleurs nationales rouge et blanche et prit le nom Biało-Czerwoni (Blanc-Rouge). En 1907, les deux équipes décidèrent de fusionner. Le nouveau club conserva le nom Cracovia et opta pour les couleurs rouge et blanche. Le choix de garder ces couleurs dans une communauté polonaise privée de son propre État et sous domination de l’Empire Austro-Hongrois (pour Cracovie) était une forte affirmation de son identité patriotique et son soutien à la cause indépendantiste.

Le rouge et le blanc sont les couleurs nationales de la Pologne qui apparaissent sur son drapeau et sur ses armes (un aigle blanc sur fond rouge). La légende raconte que le fondateur de la Pologne, Lech, lors d’une escale près de Poznań, vit un grand nid sur un arbre. A l’intérieur se trouvait un aigle blanc avec trois poussins. Lorsque Lech le regarda, l’aigle déploya ses ailes dans un ciel rougit par le couché du soleil. Emerveillé par cette image, Lech décida de s’installer à cet endroit, mit l’aigle dans ses armoiries, et nomma l’endroit Gniezdno (aujourd’hui Gniezno), dérivant du mot nid. Pour prosaïquement, le peuple slave Polane qui résidait au IXème et Xème siècle sur une partie des régions de l’actuel Pologne prit l’aigle comme symbole, certainement après avoir côtoyé à ses frontières le Saint Empire Romain Germanique (dont le symbole de l’Aigle provenait de l’Empire Romain). Etabli à Giecz puis à Gniezno, la maison Piast unifia les différentes tribus polanes et donna naissance au premier État polonais vers le milieu du Xème siècle. Cette maison royale avait pour armoirie un aigle blanc sur fond rouge qui devint par la suite le symbole de la Pologne.

#988 – SKS Bałtyk Gdynia : Kadłuby

Les coques. 12ème ville de Pologne, avec une population de près de 250 000 habitants, Gdynia est une ville située sur la côte de la Mer Baltique (d’où le nom du club Bałtyk) et constitue un important port polonais. Village de pêcheur à compter du XIIIème siècle, la cité de Gdynia devint également une station balnéaire à la fin du XIXème et au début du XXème siècle. Puis, un port fut bâti en 1924 donnant une impulsion décisive à son développement économique et urbain. Situé dans la baie de Gdańsk, le port de Gdynia était devenu le plus grand port de la Mer Baltique et l’un des plus grands ports d’Europe avant la Seconde Guerre Mondiale. Il offrait à la Pologne un accès aux routes maritimes et une base navale face à la situation incertaine dans la ville libre de Dantzig. Après avoir été bombardé par les alliés (car il était devenu une base de la marine allemande), le port redevint une place maritime importante en Mer Baltique. Au delà du trafic de marchandises et de passagers ainsi que des activités traditionnelles de pêche, la construction navale constitua l’une des principales industries de Gdynia.

En 1922, la société Stocznia Gdynia débuta la rénovation de bateaux de pêche et plusieurs navires marchands (une cinquantaine de bateaux furent rénovés ou réparés sur les premières années). La même année, l’autre société Stocznia Marynarki Wojennej démarra également son activité. En 1927, une troisième compagnie ouvrit, Stocznia Remontowa Nauta. A cette date également, des investissements (grue, quai, cale de mise à l’eau …) furent réalisés par les deux premières sociétés pour passer de la rénovation à la construction de navires. Le 17 Septembre 1931, la première embarcation à moteur conçue et construite à Gdynia fut lancée et était un bateau sanitaire dénommé « Samarytanka » (Samaritain). Dans les années 1930, les chantiers navals de Gdynia produisirent ainsi plusieurs paquebots et bateaux de commerces. En 1939, le premier cargo général à vapeur appelé « Olza » d’une capacité de charge de 1 250 tonnes fut officiellement lancé. A la fin des années 1950, l’usine Stocznia Gdynia fut modernisée, avec une cale sèche, pour construire des coques modernes. Dans les années 1960 et 1970, l’industrie de la construction navale attint son apogée, avec plusieurs grands navires construits dans la ville, notamment des pétroliers, des vraquiers, et des chalutiers de pêche. Les meilleurs ambassadeurs du chantier furent le « Manifest Lipcowy », un vraquier de 55 000 tonnes, ainsi que le cargos polyvalent « Marstial Budyonnyy » (105 000 tonnes), construit pour un armateur soviétique, premier grand navire construit dans l’industrie polonaise. Le 30 octobre 1976, une deuxième cale sèche fut mise en service, où des navires d’une capacité de charge allant jusqu’à 400 000 tonnes pouvaient être construits. Dans les années 1980, l’industrie de la construction navale en Pologne commença à décliner face à la concurrence des pays asiatiques notamment. De nombreux chantiers de Gdynia furent privatisés ou fermés, entraînant des pertes d’emploi et des difficultés économiques dans la ville. Stocznia Gdynia fit faillite en 2009 et Stocznia Marynarki Wojennej en 2017. Seule Stocznia Remontowa Nauta continue son activité de rénovation navale aujourd’hui.

Les ouvriers des chantiers navals étaient communément appelés kadłubiarze ou kadłuby, ce qui signifiait « constructeurs de navires » ou « coques ». Or, ces derniers jouèrent un rôle important dans le développement du football à Gdynia et furent les premiers à s’associer avec des ouvriers du bâtiments et des chômeurs pour former un club de football, qui devint Bałtyk Gdynia. Par la suite, les relations avec les chantiers navals s’intensifièrent (avec du sponsoring et des membres du conseil d’administration qui venaient de cette industrie). Puis, avec l’instauration d’un régime communiste, le club intégra les syndicats du chantier naval de Gdynia. En conséquence, Bałtyk Gdynia était étroitement associé à l’industrie de la construction navale et le surnom kadłuby s’est imposé naturellement à l’équipe et ses supporteurs, reflétant ses racines et l’histoire de la ville.

#916 – Widzew Łódź : Władcy Miasta Włókniarzy

Les seigneurs de la ville des travailleurs du textile. 3ème ville de Pologne avec près de 700 000 habitants, Łódź n’était pourtant au début du XIXème siècle qu’une très petite bourgade. Intégré à la Prusse, le village ne comptait que 190 habitants et seulement 44 maisons, toutes les constructions étant en bois et aucune route goudronnée. Mais, elle connut un formidable boom économique au cours du XIXème siècle qui conduisit à sa position actuelle. Avec le congrès de Vienne en 1815, la Pologne semblait bénéficier d’une autonomie sous le nom de Royaume du Congrès, qui en réalité était sous tutelle russe. Néanmoins, les autorités polonaises, soutenues par le Tsar, engagèrent un plan ambitieux de développement de grands centres industriels à travers le pays. Łódź ne possédait pas de ressources minières qui auraient pu soutenir une industrie métallurgique. En revanche, sa région fut un centre important au XVII-XVIIIème de l’industrie drapière et une culture de lin et de laine existait. Ainsi, les autorités décidèrent la création d’un pôle textile dans une ville nouvelle proche de Łódź, Nowe Miasto (Nouvelle Ville). Le Tsar donna des titres de propriétés sur des terrains à des nouveaux migrants pour qu’ils construisent des usines et leur accorda également des privilèges telles que des exonérations fiscales, la gratuité des matériaux de construction ou l’exemption du service militaire. A compter des années 1820, des immigrants allemands qui étaient tisserands, filateurs et teinturiers, s’installèrent à Łódź et débutèrent l’exploitation de ce pôle textile. La guilde des drapiers fut fondée en 1825 et un an plus tard, la première usine textile fut construite par Christian Friedrich Wendisch. Outre le lin et la laine, le coton fut de loin la première ressource de cette industrie et la Russie ainsi que l’Extrême-Orient constituèrent d’importantes débouchés pour la production. Le développement de la ville fut intensif et l’apogée de l’industrie textile s’étala entre 1870 et 1910. La production de coton s’appuyait alors sur 41 000 ouvriers et 22 métiers à tisser, soit plus de 10% des métiers de tout l’Empire Russe. En 1904, il y avait 546 usines dans la ville employant 70 000 ouvriers, principalement dans l’industrie textile. Des empires industriels se constituèrent, dont les principaux étaient possédés par Ludwik Geyer, Izrael Poznański, Karol Scheibler et Ludwik Grohman. La population suivit se développement exponentiel. En 1865, la ville comptait 40 000 habitants. Puis, 314 000 en 1897. Enfin, 630 000 en 1915. La ville devint alors la plus densément peuplée au monde (13 200 habitants au km2). La Première Guerre mondiale cassa cette dynamique. Dans l’entre-deux guerre, la Russie n’était plus une débouchée possible et le seule marché intérieur polonais ne suffisait pas à absorber la production de Łódź. En 1929, 32 grands établissements abritaient chacun près de 5 000 ouvriers. En 1936, Łódź comptait 1 946 usines textiles et 106 800 employés, faisant de la ville la plus grande concentration d’ouvriers du textile. Après la Seconde Guerre mondiale, l’Etat communiste conserva cet outil industriel mais attendit les années 1970 pour le moderniser. Toutefois, les pays du bloc de l’Est, dont l’URSS, étaient de nouveaux des terrains d’exportation. En 1950, 120 000 ouvriers travaillaient dans le secteur du textile et dans les années 1970, la production s’étalait dans 23 communes voisines de Łódź pour 275 600 ouvriers en 1975. En 1980, cette région fournissait 46,6% des tissus en coton, 46,1% des tissues en laine et 33% de la soie de la production polonaise. Néanmoins, le déclin s’amorça et d’autres industries prirent le relais. L’industrie textile ne survécut pas à la période de transition économique des années 1990 en Pologne après la chute du communisme. Le renouveau de l’économie polonaise permit une renaissance de l’industrie textile de Łódź. Si, aujourd’hui, elle ne constitue plus la puissance de Łódź, elle demeure un pan important de son économie. L’histoire particulière de la ville qui connut un développement important avec la révolution industrielle, puis un fort déclin avant de renaître avec des industries technologiques, amena à surnommer la ville la Manchester de Pologne.

#852 – Wisła Cracovie : Psy

Les chiens. Ce surnom ne réfère pas à un gentil caniche ou un affectueux toutou. Il s’agit plutôt d’une insulte inventée et scandée par les fans adverses à l’attention des supporteurs du Wisła. Car, les rivalités footballistiques en Pologne demeurent malheureusement conflictuels. Le hooliganisme dans les stades est enraciné et tenace, transformant les chants en couplets d’insultes et les tribunes en champs de bataille. Cracovie n’échappe pas aux mouvements avec ces deux clubs historiques qui s’affrontent pour la suprématie sportive sur la cité : le Wisła et le KS Cracovie. Lors des derbys, appelé la guerre sainte, les affrontements entre supporteurs sont nombreux et se règlent à coup de batte de baseball et de couteau, avec malheureusement des décès. Cette hostilité ouverte s’est diffusée dans les surnoms qui deviennent haineux. Ainsi, le « chien » qui caractérise les fans du Wisła a une connotation négative, rebondissant à la fois sur l’histoire du club et sur l’imagerie populaire.

Créé vers 1906 par un professeur et ses étudiants, le club se trouve, depuis l’époque communiste, attaché à la milice (Milicja Obywatelska – Milice Citoyenne). A partir de 1944 jusqu’en 1990, cette force professionnelle (elle n’était pas constituée de citoyens volontaires comme le mot milice aurait pu le laisser supposer) assuraient les missions de police et notamment de police politique (via sa branche dénommée ZOMO). Je n’ai pas retrouvé les conditions exactes de rattachement du club à la Milice Citoyenne mais selon certains, comme le club comptait de nombreux supporteurs et que l’autre grand club polonais, le Legia Varsovie, dépendait déjà de l’Armée Polonaise, la Milice aurait forcé la main des dirigeants du club pour se soumettre. Or, dépendre de la police n’était pas bien vu et donner lieu à du mépris. En effet, la détermination de la Milice à défendre le gouvernement communiste et à réprimer toute opposition, en commettant des exactions, conduisit à une image déplorable et sa détestation par la population. Pour les adversaires, le club représente donc encore cet appareil de la terreur communiste. Une légende colporte que le souhait de la Milice d’intégrer le club dans son giron avait pour objectif de recruter parmi ses nombreux supporteurs de nouveaux collaborateurs dévoués et bénévoles. D’où ses supporteurs gardent l’image de suppôts au service de cette autorité. Or travailler pour cette police secrète était un acte de traitrise pour la population.

Le chien, animal utilisé par les forces de l’ordre (et donc la Milice), devint donc son symbole. Mais, cette représentation ne mettait pas en avant les qualités de l’animal (fidélité, force …). Il est né dans le vocabulaire des criminels, qui se transposât dans l’argot polonais. Le sens dégradant donnait à l’animal provient du fait que, comme le cochon, dans l’imagerie populaire, le chien, notamment errant, représente un statut inférieur, inspire la répugnance et le mépris. Le transfert de cette symbolique insultante envers l’homme est connu dans de nombreuses cultures : l’homme est dégradé au rang du pire animal pour signifier son absence de toute valeur (notamment morale) et caractériser un comportement indigne (ne dit-on pas en français « sale chien ! »).

Comme vous pouvez le voir, ce surnom exprime la haine et le mépris envers le Wisła mais ses supporteurs le retournèrent aussi en leur faveur. Car ce qui catalyse la haine et la fureur de l’adversaire mérite d’être transformé en une forme capable de susciter sa terreur. Il n’est donc pas rare de voir les fans du Wisła faire vibrer des tifos arborant des chiens, mais cette fois, forts et féroces (aux crocs acérés ou bavant ie ayant la rage).

#805 – RKS Raków Częstochowa : Hutnicy

Les métallurgistes. En 1921, soutenu par l’Organisation de la jeunesse de la Société universitaire des travailleurs, affiliée au Parti Socialiste Polonais (PPS), le club de sport et de football vit le jour sous le nom de Klub Sportowo-Footballowy Racovia. Dans une Pologne qui venait de retrouver son indépendance (1918) et qui s’opposait déjà à ses voisins (Guerre soviéto-polonaise de 1919-1921), la jeune démocratie était fragile et les partis politiques cherchaient à s’imposer par tous les moyens. L’encadrement de la jeunesse était un des moyens de diffuser ses idées. Ainsi, le PPS favorisa l’emergence de ce club dans l’une des grandes villes ouvrières du sud du pays. Le club fut rapidement fréquenté par les adhérents du PPS et par ceux de la section locale du syndicat des métallurgistes. Sous le patronage de ces deux institutions, le club bénéficia des aides également des usines sidérurgiques et métallurgiques de la ville. Le premier terrain fut construit sur un emplacement mis à disposition par la direction de l’aciérie de Częstochowa en échange de son entretien. En 1935, le directeur de l’aciérie de Częstochowa alloua des fonds pour acheter des équipements et aménager le terrain. Mais ce soutien n’était pas inconditionnel. Pendant la grande crise économique, le club connut des difficultés financières et les joueurs devaient acheter leurs tenues et financer par leurs propres moyens leurs déplacements. Pour les aider, un groupe de musique et de théâtre fut créé pour collecter des fonds. Avec l’avènement d’une démocratie populaire après la Seconde Guerre Mondiale, le club demeura évidemment sous le patronage du syndicat de la métallurgie. Le blason traduisit cette appartenance avec les cheminées fumantes des hauts fourneaux qui rappelaient les rayures du maillot. Le nom même du club intégra le terme « acier » (stal) pendant quelques années.

Selon certaine recherche archéologique, la cité de Częstochowa fut un centre de métallurgie dès l’age du bronze. Evidemment la présence en abondance de minerai de fer (ainsi que de charbon et de rivières) en Silésie favorisa le développement de l’industrie métallurgique. Dans la région de Częstochowa, la première forge fut construite en 1374. Dès 1577, 32 forges existaient déjà et les usines locales étaient alors devenues les leaders de la métallurgie polonaise, tant en termes de technologie que d’organisation. Au début du XVIIème siècle, l’un des premiers hauts fourneaux polonais fut établi dans la région de Częstochowa et en 1782, il y en avait 5 autres de plus. En 1840, douze hauts fourneaux fonctionnaient, produisant près de 8 000 tonnes de fonte par an. A partir de la seconde moitié du XIXème siècle, l’industrie métallurgique déclina face à la concurrence des aciéries de Zagłębie Dąbrowskie (Cracovie). En 1878, le haut-fourneau de Mijaczów fut fermé suivi en 1881 par celui de Panki, en 1891 de Przystajnia, en 1895 de Poręba Mrzygłodzka et en 1901 ceux de Stara Kuźnica et Blachownia. L’arrêt de ces derniers hauts fourneaux était lié à la construction d’une grande usine sidérurgique moderne à Raków près de Częstochowa en 1896-1901 employant bientôt environ 2 500 ouvriers. Même si la métallurgie était désormais supplantée par l’industrie textile, elle demeurait une activité majeure de la région. Une grande partie du minerai de fer extrait en Silésie tchèque était d’ailleurs encore exporté vers Częstochowa. La région en elle-même était devenue la plus grande région d’extraction de minerai de fer de Pologne. Aujourd’hui, cette industrie demeure présente. Construite en 1896, l’usine Huta Częstochowa à Raków fonctionne toujours et constitue l’une des plus grandes aciéries et le plus grand fournisseur de tôles fortes en Pologne. Une cokerie subsiste aussi (Koksownia Częstochowa Nowa).

#770 – Lech Poznań : Lechici

Il s’agit du diminutif du nom du club, Lech. Lié au monde ferroviaire (cf. #93), le club n’adopta son nom Lech que le 16 janvier 1957, à un moment où la direction esperait donner une nouvelle ambition, une nouvelle dimension à l’équipe (notamment avec l’agrandissement du stade à 20 000 places). Ce choix n’est pas documenté mais je suppose que la référence au mot Lech était un moyen d’élargir l’audience du club en Pologne. En effet, Lech est intimement lié à l’histoire de la Pologne. Tout d’abord la légende. Dans la « mythologie » polonaise, Lech apparaît comme le nom du fondateur de la Pologne. L’histoire décrit trois frères Lech, Čech et Rus qui fondèrent les trois nations et peuples slaves : respectivement la Pologne, la Bohème (une partie de la République tchèque) et la Ruthénie (Russie, Ukraine et Bielorussie). Issus du même peuple qui était installé entre les fleuves de la Vistule et du Dniepr et qui connaissait une forte croissance, les 3 frères partirent coloniser des régions différentes pour assurer leurs développements et leurs pérénités. La part de réalité de cette légende concerne le nom des 3 frères qui sont tirés du gentilé de ces populations au Moyen-Âge. Pour les historiens, la naissance de la Pologne coïncide avec l’unification en 966 par Mieszko Ier, fondateur de la dynastie Piast, de plusieurs tribus slaves (Polanes, Masoviens, Poméraniens, Vislanes, Silésiens, Lendiens), peuples connus sous le nom de Léchitique. Polanes et Léchitiques vont être aux origines des deux dénominations du pays. Au XIIème siècle, l’historien byzantin Kinnamos appellait les Polonais des Lach et à la fin du même siècle, Wincenty Kadlubek, dans Chronica seu originale regum et principum Poloniae (Chroniques des rois et princes de Pologne) utilisait à plusieurs reprises les noms Lechitae (Lechites), lechiticus (léchitique) et Lechia pour décrire la Pologne médiévale. Mais, Lechia n’est pas qu’un terme médiéval puisque plusieurs langues modernes désignent l’Etat polonais avec cette étymologie (Lehia en roumain, Lahestân en perse, Lehastan en arménien et Lehistan en turc).

#749 – Lechia Gdańsk : Betony

Les bétonneurs. A la sortie de la Seconde Guerre Mondiale, la Pologne, comme d’autres pays occupés par les nazis, ressortit meurtrie. Outre les morts, les habitants retrouvèrent des villes grandement détruites et des infrastructures endommagées et inutilisables. Le nouveau régime communiste devait relancer au plus vite l’économie polonaise et reconstruire les villes. Le port de Gdańsk était essentiel dans ce plan pour exporter le charbon des mines polonaises ainsi que recevoir les aides de l’UNRRA (Administration des Nations unies pour le secours et la reconstruction). Ainsi, fut constitué le Biuro Odbudowy Portów (Bureau de reconstruction des ports) basé à Gdańsk et chargé de l’organisation et de la reconstruction de tous les ports maritimes polonais. Opérant de juin 1945 à décembre 1947, le BOP inventoria les besoins, élabora la conception des nouvelles infrastructures, dirigea les reconstructions et organisa l’exploitation des nouveaux ports. La reconstruction était une tâche colossale compte tenu de l’ampleur des destructions, les pénuries de matériaux, le manque et l’inexpérience de la main d’oeuvre ainsi que la pression des autorités. Le BOP se focalisa sur Gdańsk, principale débouchée sur la Mer Baltique, et dès le 15 Juillet 1945, le port retrouva une activitée. Au fil de l’année 1946 et de la multiplication des chantiers, BOP devint une entreprise importante, et dans un état sous domination soviétique, l’entreprise devait organiser la vie de ses employées. Ainsi, BOP réalisa la construction d’immeuble dont les appartements étaient destinés à ses ouvriers, gérait une cantine du personnel et encouragea la création d’un club de sports parmi ses travailleurs. Ainsi, naquit le 7 août 1945 le club qui s’appela à l’origine Klub Sportowy Biura Odbudowy Portów Baltia (club sportif du bureau de reconstruction du port de Baltia).